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2.
Les sutures.
"There were, in such voyages, incalculable local
dangers ; as well as that shocking final peril which gibbers unmentionably
outside ordered universe, where no dreams reach ; that last amorphous
blight of nethermost confusion which blasphemes and bubbles at the centre
of all infinity -the boundless daemon sultan Azathoth , whose name no lips
dare speak aloud, and who gnaws hungrily in inconceivable unlighted
chambers beyond time amidst the muffled, maddening beat of vile drums and
the thin , monotonous , whine of accursed flutes to which detestable
pounding and piping dance slowly, awkwardly and absurdly the gigantic
Ultimate gods, blind, voiceless tenebrous, mindless. Other Gods whose soul
and messenger is the crawling chaos Nyarlathotep." Dream Quest.
[179] A partir de ce fragment de la Dream-Quest nous allons pouvoir
lire ou délire, délier, dénouer, dévider le texte-lovecraft. Nous
allons le lover, le livrer à son délire, réouvrir le trou pour le
saisir dans son impossible même. Nous allons l'empêcher de se retraire
sans l'empêcher d'être Lovecraft. Nous allons le relancer plus loin
,vers ce qu'il fut, vers ses possibles. Mais...Avec Lovecraft nous
resterons dans le champ de la parole. La parole qui intéresse l’analyste
que nous sommes nécessairement ici. Il montre la "place" de
l'analyste, le (re)met à sa place d’auditeur de cette folie
non-risquante de l'abîme (une folie rassurante, capitonnée )simple trou
pris dans le récit de la métaphore familiale.
Le psychanalyste n'a plus de place lorsque s'avance véritablement un Dit,
que le Dit s’écrit, cesse de s’écrier.
Lovecraft crie; on lui recoud le corps.
1. Premiere suture; "There were, in such voyage,
incalculable local dangers.."
To voyage = naviguer, prendre une embarcation (craft) voyager sur la mer.
La "terre des rêves " n'est pas a séparer de la mer. La mer
qui donne naissance au mythe de Cthulhu, à la cité engloutie (Atlantis
CF, "The Temple" ), à la terre "emergeante" (Cf.
Dagon). Par la présence de ce verbe to voyage, l’opposition terre / mer
est effacée, mise en retrait. Le "Fish God" ( figure même des
"aversions orales" de Lovecraft, des aversions de son odorat)
est toujours là; les "odeurs" qui circulent dans la Dream-Quest
sont des "odeurs de poissons" (la puanteur des galères noires
et de ses marins). Le "Fish God" est toujours là avant même
qu'il soit nommé (Dagon, avant qu'il ne soit clairement nommé dans son
retrait Cthulhu et ne pretend, commencer, pour les critiques plus que pour
Lovecraft lui-même, un vrai Lovecraft. En fait, le même se poursuit. Il
(Lovecraft ? le Fish-God ? Cthulhu ?) est toujours là à osciller entre
les deux segments de sa signature et incapable de la lancer en avant. Il
se noie. Il s'enrêve, s’arime au rêve, navigue et s'amarre et navigue
ainsi indéfiniment sans trouver le repos de la retraite. La retraite
toujours menacée, colle au simple se re-traire de la fuite, n'atteint pas
une Demeure, moins encore une terre natale; Providence leurre. Il
s'approche le plus d'un espace propre en devenant progressivement part d'InnsMOUTH
en devenant lui même Homme-Poisson !
Sans cesse il traverse des océans, des mers; de Dylath-Leen a Baharna, de
Celephais à Inquanok, de Sarkomand à l'Island of unwholesome Secret.
Même le trajet de Dylath-Leen à la face cachée de la lune est une
navigation;les galères se transforment en vaisseaux interstellaires. Il
navigue et toujours les fonds menacent, creusent des cryptes, des grottes
des crevaces, des entailles, des temples, s'y dressent des potences.
La menace se fait vague de fond et inquiète, plus que toute vague, la
minéralisation, (une) cité(e) sous la mer... Les marins, les ports, les
tavernes portuaires insistent tout au long du périple textuel à nous
embarquer sur un "craft" sans cela mène autre part que vers l'
impossibilité de tracer une "carte".
[181] En prise à d'incalculables dangers locaux. Il reste surpris.
Il ne peut que s’assigner une place, une place loc(k)al;
device to fasten a door. Il se défend, se protège dans sa forteresse
vide. Il rencontre la menace dans une forteresse vide, d’où les
"divins" (Great Ones) ont été chassés ; KA/DEATH. Il faudrait
entendre ici un "il ne veut pas la mort" , ne veut pas mourir et
le comprendre comme ce qui rend inaudible les "divins" , qui les
chasse. .. Nous touchons là au "péril choquant " qui revêt
aussi tôt chez Lovecraft l’apparence biographique d’un "corps
tenaillé par la faim – la menace orale.
2. Deuxième suture: "as well as that shocking final
peril"
La quête n'est qu'un jeu de "peri" - d'autours. Elle tourne
autour du trou, trou de l’ombilic, trou de la bouche, trou de l'anus.
Elle ne s'abîme pas. Tourne;tourbillon (whirlpool),maelstrom... , Le
periple "cercle" strictement l'Abime pour qu'il ne soit pas
autre chose qu’un « trou » : mindless, voiceless, un
trou qui engloutit, a (w)hole who gnaws hungrily.
[182] 3. Troisième suture:
"Which gibbers unmentionably outside the ordered universe..."
Il baragouine. Tout cela est porté par le verbe; to gibber. Le singe,
l'idiot, est laid, bossu. En retenant GIB dans gibber nous pouvons
décrire le "gibeux" , gibbous qui provient de "hump"
(bosse ) La laideur est railleuse. "Gibeuse est en effet la
"raillerie". Les "monstres" se montrent toujours
"railleurs". Ils rusent. Comme Nyarlathotep qui peut transformer
sa forme chaotique et rampante en stature de jeune pharaon... Avec
d'incalculables dangers locaux le GIB n'est pas loin du "Gibbet"
de l'étranglement .Il étrangle la voix (toutes les voix que l'on entend
dans la Dream-Quest, et ailleurs dans tout le corpus lovecraftien. La voix
étranglée profère des mots inarticulés, sans signification (meaningless,
senseless)
Elle renvoie à tous ces mots comme "ooth-nargai, Dylath-leen,
Sona-nyl,sarkomand cthulhu, Rhlie, à tous ces fragments de langues
inconnues. Sorte d'affolement "phonétiques" où s'inscrit
l'indicible;le corps, la corporéité. Des mots, des fragments qu'aucune
lèvres (lips)n'oseront, sans frémir articuler, ou simplement remplir (Fill)...Elles
peuvent certes dans l'aire du rituel les in / évoquer pour faire
surgir le désordre (l'outre, le hors bord, le débordement...) dans
l'ordre;le désordre c’est-à-dire en fait le retour de ce qui
"refoulé" ou plutôt refusé revient déborder les défenses,
provoque le corps et le repoussent jusqu'à ces retranchements extrêmes
"where no dreams reach" ce qui précisement constitue le
quatrième point de suture-
4. Quatrième suture : "...where no dreams reach..."
Le corps est a saisir dans cette ultime retranchement
5. Cinquième suture: "that last amorphous blight of
nethermost confusion"
[183] La corporéité ne sera donc qu'un chaos, péril choquant et ultime;
amorphe confusion ( des organes en dérive : His hypersensitive nerves
reacted on his bodily functions to such a degree as to give I the
appearance of many different physical illnesses". Nommant à la suite
les unes des autres, des maladies; "irregular heart action",
acute kidney trouble, frightful digestive trouble", réductibles à
des "malfunctionning nerves" donnant lieu à d'atrocious
sick-headaches". Amorphe confusion qui appelle la "fuite"
-(s)Till-in-Ghast - des chaînes de synonymiques de l'horreur - Went-worst
-constituant le lexique du texte. Choquant introduit, invoque de
son "amorphisme" les disgusting, nauseous, hateful, abominable,
repugnant, abhorrent, detestable, distasteful, loathsome, sickening …
etc. selon les axes auditifs / olfactifs. Choquant introduit le
lexique à l'outré; ce qui est hors de l'ordonné et du réglé.
Amorphe, sans forme le texte (?),le corps (?) -nous ne savons plus.
Nous ne savons plus à qui accorder les qualités. Le néfaste y est
surpris. Le néfaste, le fléau se dit ici "blight". Il retient
le Light en lui. Il interdit la lumière (Light) mais aussi une certaine
légèreté(light). Il est dans le trou le plus sombre.
Blight ? Blight; rouille, brûlure, charbon, nielle(des céréales),
brunissure (des pommes de terre), cloque(des pêchers etc. ). Par le
soleil brouissure. Entomologie (Plant-house) Puceron. Influence néfaste ;
fléau. Tout un parasitage se fait jour - il instaure la nuit.
[184]. La nuit ou rien n'est protégé ou préservé dans son essence mais
ou tous les discours "racistes" de Lovecraft viennent prendre
(son) corps, viennent dire l'image corporelle. Dire son corps aliéné,
parasite, brûlé, rouillé. Son corps fermé à clef, les lèvres (lipps),
fermées, la bouche remplie (filled) de borborygmes, déglutissant... Son
corps qui blasphème... .
6.Sixième suture : "...which blasphemes and
bubbles at the center of all infinity..."
La convulsion extrême est au centre de toutes les infinités. L'infinité
comme telle est interdite "fermée" retrouve un centre. La
confusion prive de lumière (light) , elle est un "fléau" (blight)
Elle met fin à toute infinité. Elle limite, bien qu'elle se fera en la
personne d'Azathoth "boundless" sans limite.
Le "sans-limite' n'est pas l'Infinité. Il n'est qu'un interminable
embarquement (to be Bound to = ready to go to). La confusion qui donne fin
à l'infinité (l'Abîme) sera blasphémante. Elle blasphème contre
...qui ? Elle ne blasphème pas contre le divin. Elle est le blasphème en
elle-même en tant que "projet chimérique "illusion" (bubble).
La confusion sans décision, incapable, de faire l'arbitre (to make an
award) est simplement a bubble scheme soit une "duperie".
Toujours. Encore. Lire craft. To bubble ; bouillonner, dégager des
bulles. Le blasphème ici ne fait que bulles. Et le B de bubble, blight et
blasphème "blame " la lumière, la pourrit.
La lumière qui tombe du ciel (plus exactement qui provient de l'espace
"hors") est une "couleur" ("The Color out of
Space",est une lumière qui pourrit. Elle pourrit en tant que
provenant de ce qui est "Out". Cette lumière fait ombre (Shadow).
Ce qui provient de l'Hors, de l'Extérieur "ombre" la lumière.
Ce qui provient de l'espace extrême, extérieur semble provenir du temps
(The Shadow out of Time) ? Le temps met son ombre sur la lumière? Le
temps comme quatrième dimension joue des tours. C'est par un tour de
temps que la sorcière entre à nouveau dans sa maison(Cf. The Dreams in
the Witch-House) Dream-time. Le "dreaming" est un jeu avec le
"temps", un calcul sur la quatrième dimension, une implosion(le
calcul [185.] 1a clef... mais en même temps, le lieu de provenance de ce
qui provient du temps et joue des "tours" sinistres.
Le temps "extrême" de l'espace blasphème et fait des bulles.
Le temps est trou. Il n'est pas mesuré comme Abîme. Il est un trou
"centre' de toutes les infinités et en même temps un calcul
irraisonnable. Le temps(re)devient toujours l'espace. Il est un corps
amorphe, non pas sans-forme, mais à la forme anarchique; un affo1ement
des différences.
7.Septieme point de suture : "...the
boundless daemon sultan Azathoth, whose name no lips dare speak aloud.
.."
Sans limites ou frontières (bounds) mais aussi sans détermination ou but
(un-bound to...),sans lien, purement errant et sans forme, déformé (ce
qui' traduirait au mieux ici le "blasphème"),bouillant de
confusion, celui qui met fin à toute infinité est le sultan (se rappeler
le nom de l'Arabe Fou, auteur du Necronomicon, le nom du mort - le
souvenir du Vathek) maître, AzaTHOTH. Nulles lèvres n'osent prononcer un
tel nom... On en perdrait la voix, on s'étranglerait. Azathoth serait-il
à Kadath une perversion de Yawhe dans Kadash...? Prononcer son nom à
haute voix "out loud" , "aloud" c'est risquer de
perdre la voix.
De peur d'être blâmé ou "asservi" "on bondage" le
texte demeure les lèvres pincées. Privé du bond (bound vient du
français bondir) comme Azathoth (boundless)la parole est aliénée,
verrouillée. Elle n'est pas prête de se rendre sur un chemin (to be
bound to, ready to go to, on the way to).
De "buin", "bua" ; to prepare ) To be bound to (mot
que l'on rencontre souvent dans le texte) est aimless ; il peut s'écrire
: to be "bound-less" to. La parole Privée du sens (direction)
dans le "blâme" demeure comme "bouche affamée" ,
dans la non-lumière. Est une "érosion". Elle n'est que
négativité [186.] rongeante (gnawing negativity).
Et ce qui gnaws ne sait pas, doesn't know, révèle l'unknown': la peur de
l'Unknown :
The oldest and strongest emotion of mankind is fear, and the oldest and
strongest fear is the fear of the unknown" (Lovecraft, Supernatural
Horror in Litterature),la peur de l'Unknown Ka-death. Une peur qui ne
serait pas révélatrice d'une pleine situation. Une peur qui rive à un
ob-jet du monde - l'Unknown. Pour ne pas nommer ce qui ne peut être (que)
rongé ou dévoré.
La Parole privée du sens -la parole baragouinante; bubbles and gibberish
rongée par peur d'Unknown. La peur du texte-lovecraft serait alors simple
peur d'être mangé, devoré ( physiquement et/ou spirituellement) Le
péril est un péril "oral";le trou c'est la bouche...c'est le
parcours alimentaires d'un trou (bouche) à l'autre, innommable, l'anus.
Nous avons légèrement anticipé sur ce qui suit.
8. Huitième suture; ". ..and who gnaws
hungrily in inconceivable, unlighted chambers beyond time…"
Inconceivable… Nous pouvons le rattacher à tous ces "in"
"un" et "less" privatifs qui circulent dans le texte;
inconceivable, unlighted, unmentionably, incalculable, voiceless, mindless
etc. Surdétermination de la négativité Azathoth, dieu des artifices
opère une corrosion, une érosion, une consumation... Azathoth ronge,
érode le texte depuis son centre (son ombilic). L'ombilic du texte serait
le "trou" non-cicatrisé où commence le "corps
psychotique" (CF L'Ombilic et la Voix, de Denis Vasse )
Il ronge affamé (he gnaws hungrily) au centre des infinités. Il est
tenaillé par la faim (hunger). Ainsi il est toujours retenu. Il ? le
centre. Il ? l'ombilic ou la bouche. Il ? Azathoth etc. accroché -
accrocher; to hang (up) - hung vient, du seul point de vue
"phonique", de hang) .Il est le crochet qui retient; crochet -
hook (Horror at Red Hook). Ce qui retient accroché ainsi n'est que le
"blâme ". Le blâme de celui qui blasphème par son baragouin,
son bouillonnement qui lui fait perdre le sens; hankering, vif désir,
grande envie. Celui qui blâme est en même temps le blâmé. Le blâme
est auto-reproche, auto-punition un vif désir [187.] qui se concentre
autour de la bouche. (in (s) mouth). Désir de manger, de parler de
cracher des mots, d'insulter. %ais finalement un cri retenu. Replier dans
la nuit des "unlighted chambers" (unlight, b/light ou le
"b" joue le rôle du privatif "un") il ne peut pas
être en chemin. Il demeure accroché. Il n'y aurait donc jamais de
"Parole" mais seulement le débit interminable de l'analysant
tournant autour du leurre une autobiographie ? Le biographique qui donne
le sens au "temps" qui s'énonce si souvent a l'entête même
des textes de Lovecraft ; ça a déjà eu lieu dans un "beyond
time", "par-delà le "présent" dans le passé" '
inconcevable ( non-réinscriptible) du passé.
Rien d'autre n'est possible dans ce temps que le "to place again"
d'un temps heureux qui chez Lovecraft se confond avec la pure Bêtise,
l'état de bête que portent ses "monstres" (voiceless ou doués
de langage mimétiquement humain, "mindless" etc.), son corps
sans parole", inhumain toujours déporté, bafoué. La
"vérité" de sa "marvellous sunset city" ce sont les
monstres; the marv.ellous sunset city sans corps et pure âme (sans amour)
trouve sa conséquence effective, et affective dans la pure bestiauté des
monstres - mindless body.
Le corps conçu comme sans voix, privé de sens, sans esprit, se montre
dans le monstre. Sa façon de se montrer est de demeurer accroché,
caché, emmitouflé dans la nuit, replié dans sa chambre, dans des
pièces sombres, d'éviter le jour, de ne pas se montrer en plein jour,
donc de ne pas se montrer du tout. La façon qu'a le corps-Lovecraft de se
montrer dans le corps-Lovecraft-texte est de ne pas se montrer du tout.
Ainsi n'est-il que "monstre". Il faudra donc entendre uniquement
comme ce qui montre un corps dans se façon de se retraire.
Le "texte" marche à pas-de-corps - d'où il "se
monstre".
Accroché à ce qui le montre(du doigt, donc à ce qui le blâme) il n'a
pas de corps, il n'a de corps que dans le "monstre "
c'est-à-dire dans le texte, dans l'écrire hallucinés; l'affolement
"sonore des mots.
9. Neuvième suture ; "amidst the muffled,
maddening beating of vile drums and the thin monotonous whine of accursed
flutes...
[188] Dans cette "affolement" nous isolerons "maddening
beating" pour le conduire en proximité du "maddening need(to
place again), pour saisir, dans le "beating" et le "need(le)"
ce battement qui pousse à écrire. Ecrire pour amortir (un son, un bruit)
"to muffle" dans la nuit enveloppante. Il écrit dans la nuit,
la nuit qui mûrit les monstres ? La nuit qui le protège ?
La nuit de l'encre qu'il (dé)verse pour se rendre supportable les
monstres, pour rêver à une "cité glorieuse" (sa propre
Jérusalem Céleste);l'écrire nocturne, pour tout ce qu'elle rate dans le
battement de l'aiguillon, cette musique sur quoi il se casse une dent (The
Music of Erich Zahn).
Son incapacité à saisir la musique autrement que dans cet affolant
battement (as)sourd(i) des vils tambours, le pleurnichement (enfantin, le
vagissement du nourrisson qui semble ne demandé rien d'autre que de la
nourriture mais crie sa Demande d'amour) tenu et monotone des flûtes
maudites. Toujours des flûtes et des tambours.
The Festival; "I saw something amorphously squatted far away from the
light, piping noisomely on a flute...I heard noxious muffled.
Le festival, cité ici pour souligner la répétition des "amorphous
/to pipe /flute /noxious /to muffle /flutterings, où la sédimentation
des associations (les associations figées par lesquelles HPL (re )vient
sans cesse, nous (r)appelant nous-lecteurs, nous un autre, à ce qui fonde
son désir d'écriture et la raison de notre attache - notre accoutumance
à cette écriture là).
The Dream-Quest "certain of the toad-things produced disgustingly
carven flutes of ivory and made loathsome sounds. To that hellish piping.
[189]. Toujours la musique hésite entre deux "tours" (hésite
avec tout le texte): Many times the moon hears strange music as it
shines...but whether that music be the song of the god or the chant of the
cryptical priests, none but the King of Ilek-Vad may say. .. La
musique trompe, séduit avec Nyarlathotep apparaissant en jeune Pharaon-
toujours dans la Dream Quest ; In this low fanfare echoed all the wonder
and melody of ethereal dream; exotic vistas of unimagined loveliness
floating from each strange chord and subtly alien cadence".
Quelques fois, rapidement, on saisit la réponse des "horns and viols
and voices" aux cloches d'une cité, plus souvent des chants de
marins (des voix d’homme, toujours). Et si la fanfare of supernal
trumpets and a clash of immortal cymbals" ouvre le Dream quest,
s'attache à la cité merveilleuse cité du couchant, cette même
"fanfare" referme la quête dans la parole de Nyarlathotep;toute
la "signifiance" de la quête s'y efface d'un clash ! Muffled
beating, battement amorti, assourdi ou étouffé des tambours ne doivent
pas nous faire perdre le "mufle" (le mufle, le museau ou le
groin; ce sont des pattes, des griffes (claws) qui battent les tambours,
des bouches (des gueules) qui se forment dans des surfaces amorphes qui
"sucent" et "aspirent" -avant même de souffler dans
des flûtes maladives !...
10. Dixième suture : "...to which detestable
pounding and piping dance slowly, awkwardly and absurdly the gigantic
Ultimate gods, blind and voiceless, tenebrous, mindless Other Gods..."
Avant de poursuivre cette étude anatomique disposons [190] d’un triplet
d’adverbes en vis à vis d'un triplet d'adjectifs pour produire d'autres
effets de sens ,vers le texte, ses dimensions retenues; blind /awkwardly
voiceless /absurdly mindless. Dans la cavité alvéolaire, dans la nuit
maladive ou parasitée par le blight, la nuit decharnée (réference aux
night-gaunts, au cold waste qui encercle la forteresse, Kadath) les corps
amorphes répondant à toute une incertaine musique, sont mis en scène,
une chorégraphie – ça danse. Musique incertaine qui concasse, broie et
pile -c'est le sens du verbe "to pound" –mais aussi pèse (a
pound ;une livre) et en même temps canalise (to pipe, canaliser) l'air
dans la flûte (to pipe, jouer de la flûte). Musique de digestion, musique
de boyaux. On saisit alors la menace du texte-Iovecraft; avoir
les boyaux à la place de la peau... Le détestable, le monstrueux
met inside-out (une version une image de l’enfantement;
l'enfant boyau, l'enfant-ombilic qui ne voulait pas sortir est mis à l
'extérieur, visqueux, viscères : rubberish, amorphous, trop plein d’animalité
avant qu'il ne soit reçu dans un don de Parole ... Biographiquement HPL
est reçu dans un refus...etc.) Histoire de tuyauteries, de boyaux.
Histoire passionnante pour le psychanalyste ordinaire qui va, pouvoir
lancer ses plates équivalences ; tuyau = pipe = pénis non pour
reconnaître l’émergence de pulsions mais pour montrer la carence de
leur Aufhebung dans la génitalité...Psychanalyste qui manque donc ce qui
fait [191] les corps-lovecraft (les monstres); saisir la plume (pencil)
POUR PAS REPONDRE autrement aux pulsativités; saisir la plume pour se
(re)faire une peau, prendre, peut-être, l'écriture en "ersatz du
coit", relever l'érogènéîté du corps comme des inscriptions
hérétiques, ne pas laisser le désir du "young Pharaoh, gay with
prismatic robes" s'exprimer autrement que dans le dé-père-issement,
la désespérante image biblique du tentateur...ne pas le laisser venir
désirant et désiré mais le suspendre, le balancer entre les deux
versants de la signature.
Alors peut se comprendre dans cette mise en scène du désir la plus
vieille figure de la danse: seul, le Mal rampe chorégraphiquement car tel
est l'ordre du "chaos". Proprement le chaos rampe, montre l'en-bas,
est ainsi monstré par l'en-haut. Si le mal rampe le bien doit avoir des
ailes; c'est là où HPL s'embourbe, s'anglaise. Des dieux aux autre-dieux
l'en-haut se heurte toujours à l'en-bas. Le péché englue, il est sans
âme, sans voix, pur corps et quant il a de l'âme, il trompe...
11. Onzième suture : ". ..whose soul and messenger
is the crawling chaos, Nyarlathotep."
Cette âme (soul) qui rampe est la seule de la quête d'un charretier
(Carter, notons que Carter est l’équivalent Anglais de Wagner, un autre
charretier) jeté at random (au hasard, random, écoutez Randolph.
..Random Carter) pour faire sens, à donner la "Direction de la
cure", à montrer qu'il (le sujet de la quête) se trompe, que son
but n'est pas un autre monde ou un autre lieu mais simplement ce qu'il
croit être son enfance. [192] Seule la menace persiste, insiste du fond
outré de l'Ailleurs, de l'espace. Au fur et à mesure que le texte de
Lovecraft se pro-page,les "Dieux" se retirent, s'effacent ,
disparaissent. Seule, la menace persiste. Carter, lâché à bride abattue
dans le hasard n'aura lui-même comme recours qu'une
"métamorphose" ; devenir lui-même un monstre, la facette
Skauba. Cette facette qui essaye de parler en se travestissant en Swami
Chandraputra ( Cf. Through the Gates of the Silver Key). Notons le passage
de l'Egypte habituelle, à ces Indes. Sans plus insister.
Essayons de mieux dégager la menace (orale) dans son insistance ;
"Unswerving and obedient to the foul legate's order's, that hellish
bird. The Shantaks "were not any birds or bats known elsewhere on
earth or in dreamland, for they were larger than elephant and had heads
like a horse's The Shantak-bird has scales instead of feathers, and those
scales are very slippery".
Notons "scale", écaille (de poisson) ou squasme. Une odeur de
poisson est encore perceptible...) "plunged onward through shoals of
shapeless lurkers (notons : shoals ; haut-fonds (marins) ) and carpers in
darkness and vacuous herds of drifting entities that pawed and groped and
groped and pawed; the nameless larvae of the Other Gods that are like them
blind and without mind, and possessed of SINGULAR HUNGERS AND THIRSTS".
La menace orale dans la nuit et dans tout ce qui est "privé de
" ( sens, voix, esprit , vue etc.) dans le "Less" le
manquement tâtonne (to grope) tripote, patouille, donne des coups de
patte, piaffe, gratte de la patte (to paw) ou de la griffe (claw) rampe
(crawl) et f'ait (sa) loi (law) , la loi la plus basse (lowest law) celle
des tripes qui tenaillent. Le monstre revient toujours aux tripes;
"When l was 6 or 7 I used to be tormented constantly with the
peculiar type of recurrent nightmare in which a monstruous race of
entities ( called by me "Night-Gaunts" -I dont know where I got
hold of the name) used TO SNATCH ME UP BY THE STOMACH - BAD DIGESTION ?
"
Le monstre provient des tripes et retourne aux tripes; IL PARLE LE CORPS.
Par le "monstre" le "corps bafoué" parle ou plutôt
il "crie"
La bouche fait entendre le cri. La morsure fait entendre l'insatisfaction
eu stade oral de succion [193] "LA BOUCHE est le commencement, ou, si
l'on veut, la proue des animaux... Mais l'homme n'a pas une architecture
simple comme les bêtes, et il n'est même pas possible de dire où il
commence.
Chez les hommes civilisés, la bouche a même perdu le caractère
relativement proéminent qu'elle a encore chez les hommes sauvages.
Toutefois, la signification violente de la bouche est conservée à
l'état latent. Et dans les grandes occasions la vie humaine se concentre
encore bestiale dans la bouche, la colère fait grincer les dents, la
terreur et la souffrance atroce font de la bouclle l'organe des cris
déchirants. .." Bataille, Bouche, Tome I.
"BUT THE HEAD WAS CHIEFLY TERRIBLE BECAUSE OF THE MOUTH.
That mouth had great yellow fangs and ran from the top to the bottom of
the head opening vertically instead of horizontally" Dream-Quest.
Le cri déforme le visage.
Le cri est d'autant plus terrible que le Gug qui est décrit n'a pas de
voix "but talk by means of facial expression" n'a pas d'esprit,
est purement animal.
Le territoire où le Gug se tient, est lui-même menaçant comme une
bouche :
"for this is THE MOUTH of the vaults of Zin, and the vindictive
Ghasts are always on watch there murderously for those denizens of the
upper abyss who hunt and prey on them. The Ghasts try to come out while
the Gugs sleep. They are very primitive, and eat one another ..."
Dream-Quest.
Partout, de fond en comble des bouches, des gueules qui s'entredevorent
dans un paysage trou " de bouches
"the mouth of the vaults of Zin", "the great caverns mouth".
Bouches où se surprend, lisible ou risible une "scabreuse humanité:
"Carter turned sick at the aspect of that scabrous and unwholesome
beast whose face is sc curiously human despite the absence of a nose, a
forehead and other important particulars.
Pas de "visage humain" ou presque aucun...tout est lisse,
glissant, de la consistance d'un muscle blanc, d'un viscère. [194] La
tessiture est membraneuse, damp slippery... L'horreur prend à l'estomac
avec. C’est ghasly, horrible s’écrit avec gastric /stomacal.
Même la paroi des bâtiments, des vestiges architecturaux, couloirs,
labyrinthes malaxent, glissent.
Le texte s'enviscère.
Les Dholes" dolents et plaintifs, larmoyants (doleful) : "are
known only by dim rumour, from the rustling they make amongst mountains of
bones and the slimy touch they have when they wriggle" - to
wriggle, frétiller, tel un poisson; se tortiller, s'agiter, tel un
nourrisson. Sans forme précise ils "grew alternately convex and /
concave Dans les replis, les remous du hole de la nuit les dholes
digèrent ...comme tant d'autres scabreuses animalités, à la lisière du
texte et du rêve. Tels les zoogs, pleins de cette vie (zoo) douteuse,
friands de viande tant physique que spirituelle, risquant la dévoration
du texte-même. Mais ce dernier alternativement concave ou convexe se
retournant comme un gant ,parfaitement élastique contrattaque et digère
– gère - organise les pulsions mortifères qui sans lui attaqueraient,
se retourneraient contre l’organisme HPL, ce corps bafoué... Bouche,
anus confondus, les orifices affamés désorganisent l'espace entre
altèrent le texte biographiquement, le retiennent dans la famille,
plient, soumettent corps et corps du texte à leur rigueur
"animale". Il ( corps-texte ) bouillonne, baragouine,
tripote, donne des coups de pattes, se replie dans les holes, les
terriers, se fait plaintif, dolent, glisse, humide et collant, gluant,
amorphe, blasphémant, puant. Il se fait cri étouffé - la langue
désarticule émet des séries phonémiques à la limite du
borborygme ? II rampe. il serpente. il ment.[195]
Il s'enmonstre.
Le texte monstrueux gémit. Il ne peut atteindre la dimension d'un dit. Le
dit échappe dans l'idiolecte, se résorbe dans la signature biaise.
Pourtant HPL ne se manque pas. Si le texte se fait analysant, nous nomme
en place d'analyste, c'est pour mieux se moquer de nous, pour nous glisser
entre les doigts, pour se réserver sa jouissance, propre, hors texte,
ailleurs, à Innsmouth.
Pendant que nous écoutons sereinement le monstre, le texte lentement,
discrètement se fait poisson, nous glisse entre les doigts ...
3.
Jouissance océanique
[196] Symbole pénien, le poisson frétille. Enorme bouche aux
écailles tentatrices, il affirme l'érection "orale". Le texte
ne bande pas . Aux rives "tranchantes" de l'Oukranos le poisson
opère les mirages de la castration; "...a carnivorous fish catch
a fishing bird, which lured to the water by showing its temp- ting scales,
in the sun, and grasped by the, beak with its enormous mouth as the winged
hunter sought to dart down upon it" Dream Quest.
L'évènement discret peut passer inaperçu, détail superflu. Détail que
le copiste ignorera nécessairement, nous permettant ainsi d'identifier
les originaux, détail auquel un Freud consacre son attention
"flottante" dans son triste Michel-Ange)
a) le pécheur péché, b) le pécheur devenant poisson. Entre a) et b) il
n'y a qu'un pas. Un pas franchi allègrement à Innsmouth, un village de
pécheurs où le menu fretin frétille avec les Deep-Ones - ni homme, ni
poisson tant l'un que l'autre ou plutôt batraciens…
[197] Malgré Cthulhu, la pieuvre qui règle tous les commentaires de
Lovecraft, Dagon règne en maître sur le texte. Il distribue tous les
traits ichtyoïdes, jusque dans ses catacombes. Le texte s'écaille.
Frétille. Ses ondulations ne sont pas celles d'un reptile qui peut pour
un temps, un temps fort court, satisfaire l'interprétation avec la figure
élancée (slim)de Nyarlathotep, le tentateur visqueux (slimy). La
tentation est ailleurs...Le dieu auquel le texte sacrifie, ordonne sa
jouissance est Dagon, le dieu-poisson ;la jouissance du texte-HPL.
Le tentaculaire Cthulhu n’est que le gardien de cette jouissance. Il
interdit, méduse le lecteur pour qu'il en reste au plaisir du texte. Il
assume la distance entre lecture/écriture, ici, une convention
fictionnelle; nous faire peur proprement, en règle, en présentant les
identifications obstacles à une lecture analytique. La pieuvre, le
mollusque, le céphalopode (avec l’en - celephais ) met en tête ses
contours, son dessin "primitif", tout en pied ou tout en tête,
il s’envisage directement dans l'ordre infernal, par habitude, par
tradition. Le poulpe se retrouve dans l’ornementatioa de l'Europe du
Nord du monde celte et de la Grèce. C’est aussi une représentation du
signe du Cancer. On lui donne, dans une rigueur mystifiante, une origine
hyperborèenne. Il convient donc a priori aux tentations nordiques, aux
folies boréales de Lovecraft - à la fois Kadath "in the cold waste",
et At the ~Mountains of Madness) mais aussi les renversements australs de
The Shadow out of Time. Cthulhu, la pieuvre dresse ce paysage nordique où
s'érige le rêve des têtes blondes, des bras virils et musculeux dont à
l'ordinaire nous réchauffons une érotique suspecte. Cthulhu décale
cette érotique, [198] pour texte.
Le Celte devient la Pieuvre(Cthulhu))en précise les contours
"tentaculaires" mettant ainsi le texte sous scellés.
Cthulhu est le Gardien, le dépositaire des clefs perdues. Lorsque les
commentateurs insistent sur la constitution d’un mythe de Cthulhu comme
figure proprement lovecraftienne, ils ne se trompent pas dans la mesure
exacte ou ils acceptent d'être trompés par le texte-même. Ils mettent
en avant la résistance du texte, lisent le texte comme un legs non comme
une demande d'amour. Ils lisent le texte trouvé aux pieds des murs d'Eryx
: "Stanfield could have reached the outside en- trance by walking
twenty-two or twenty-three feet if he had found the opening which lay
directly behind him -an opening which he overlooked in his exhaustion and
despair" The walls of Eryx..
La lecture ordinaire en reste là, n'atteint pas l'autre côté.
Elle ramasse un "reste", le journal tenu au jour le jour par J
Stanfield pris entre les murs d'Eryx (un nom propre que nous pourrions
disposer dans le lexique celtique) elle ne se situe pas du côté du geste
scriptural, geste qui continue hors des murs d'Eryx. Après ce récit HPL
signe d'autres textes) mais du côté de ce qui garantit a cloture d'un
univers sémantique lovecraftien, ce qui résiste contre l'écrire, refuse
de se mettre à la place de ce qui est le need to place again ou ce
qui come over him comme un soudain et unconquerable urge to
write .
Ecrire(to write originellement "writan" signifiant, to scratch,
égratigner, donner un coup de griffe, est ici un mouvement
d'agonie.
[199] To writhe signifie se tordre le corps de douleur. La douleur du pen
(pain) cil, avec le sang de l’égratignure (signature – seing, sang).
Ecrire est le geste du monstre (il montre, il fait signe, se démontre,
fait la démonstration, démonté ).
Monstre et écriture sont l’un et l’autre « damnably human in
general outline » mais pas plus que ça. L’écriture mine le
monstre comme le monstre (la) mine humainement. Une chose est certaine
elle fait sa peau de monstre à HP !
Si les contours sont humains, permettent une (in)certaine ressemblance,
une ambiguïté. These creatures must have been convenient on e for they
were truly not unlike men when dressed carefully shod and turbaned and
could haggle in the shops of men without embarrassment or curious
explanations"
Dream-Quest.
Il se défont très vite, la resemblance est fragile, transitoire : "The
face beside me was twisted almost unrecognazably for a moment while
through the whole body there passed a shivering motion - as if all the
bones, organs, muscles, nerves, and glands were readjusting themselves to
a radically different posture, set of streeses, and general personality.."
The Thing on The Doorstep
L’organisme est désorganisé. Il se mon(s)tre sans
dessus-dessous comme un gant comme si ses parties ne parvenaient plus à
constituer un tout cohérent comme si elles y résistaient. "The most
merciful thing in the world, I think is the inability, of the human mind
to correlate all its contents (...)...but some day the piecing together of
dissociated knowlefge will open up such terrifying vista of reality, and
of our frightful position therein, that we shall either go mad from [200]
the revelation or flee from the deadly light into peace and safety of a
new lark age" The call of Cthulhu.
Les monstres sont monstrueux parce qu'ils ne cessent de rater les
corrélations qu'ils entament constituant des organismes hybrides – à
la fois minéraux, végétaux et animaux usant du « craft »
pour mimer l’humain. Ils se reproduisent par « spores »
comme les cryptogames ou par scissiparité, les protozoaires. Ils se
protègent ainsi de l’indécente copulation b) se groupant en
institutions fondées sur le droit et la religion "naturels",des
sociétés composites "a sort of fascistic socialism" (Cf. The
Shadow out of Time-. Ils sont monstrueux en fait parce qu’ils
(dé)rêvent indéfiniment le rêve d'Angleterre, qu'ils imposent à la
place l'American Dream dont le credo affirme sans y parvenir un Tout
S'avoir spectaculaire.
A un certain niveau les monstres sont des instances critiques du texte,
les doutes d'un HPL sur l'avenir de la civilisation industrielle. Ainsi
nous , ramènent-ils vers le mythe de l'Atlantide.
Mais plus profondément les monstres font la peau du texte, l'écrivent.
Ils ne cessent de raturer les corrélations, de bricoler des assemblages
de "topoi", des ensembles de Textes. Ils ne cessent de confondre
la carte, de la rendre impossible. A l'infini, ils emmêlent les fragments
biographiques et signent pesamment chaque fragment d’un même, H. P. L
; P. L. H ; L. P. H… résorbent en morcelant le texte dans
sa seule et unique mesure, la signature.
[201] Ils le bricolent pour lui éviter cette jouissance qu'il atteindra
à son insu, à l'ombre d'1nnsmouth. Aussi lui interdisent-ils de se
souvenir, de se remembrer - ou de se re-placer. Ils le terrorisent.
On supposent que s'il jouissait, il deviendrait fou, un love/craft, alors
il se re-trait comme un phillips. Prenant le Phantasme à l’envers)il se
prive de son lien et projette dans le lieu la toute puissance de l'Autre;
- "You see them ? (walking or drifting through my supposedly solid
body...) you see them ? You see the things that float and flop about you
and through you every moment of your life ? You see the creature that form
what men call the pure air and the blue sky..." From Beyond
Les monstres, le texte résistent - pièces de la résistance . Ils
sont partout a veiller contre tout lien, ils aliènent. A moins qu’il
(qui ?) ne devienne lui aussi un monstre ? C'est ce qui arrive avec The
Shadow over Insmouth où le narrateur devient poisson, nous glisse entre
les mains pour (re)trouver son élément et (en) jouir : "He will
plan his cousin's escape from the Canton madhouse, and together we shall
go to marvel-shadowed 1nnsmQuth.We shall swim out to that brooding reef in
the sea and dive down through black abysses to Cyclopean and many-columned
Y'ha-nthlei,and in that lair of the Deep-Ones we shall dwell amidst wonder
and glory for ever"
De là il peut toujours nous écrire (to write) en grattant (to scratch)
ou en frappant de l'ongle (to fillip),du moins tant que la métamorphose n’est
pas complète.
[202] Nous écrire, par exemple en ce latin ancien de la main du
Docteur Allen, de Curwen…très incurvé comme si la lettre n'était le
trait ce qu'elle dessine entre ses jambages...
The letters were indeed no fantastic invention,
but the normal script of a very dark period. They were the pointed
Saxon minuscule of the eight or ninth century A.D and brought with
them memories of an uncouth time when under a fresh Christian veneer
ancient faiths and ancient rites stirred stealthily "
The Case of Charles Dexter Ward. |
Traces ramassées, décryptées par un Lovecraft, par un lecteur
quelconque avant qu'à leur insu, ils ne scandent à leurs rythmes
cardiaques les gargouillements de la langue de Cthulhu, ne livrent leur
être à la pure physiologie des phonèmes-pulsions, ne viennent s'éjouir
dans les eaux d'Innsmouth et ne chantent
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